Page:Aulnoy - Contes des Fées (éd. Corbet), 1825.djvu/178

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
166
LA PRINCESSE

il lui dit : « Mamour, allons tenir le conseil sur ce que nous avons à faire. » Il l’emmena par-dessous les bras, car elle tremblait encore de la peur que lui avait faite Carabosse.

Quand le roi et la reine furent dans la chambre, ils firent appeler leurs conseillers ; l’on ferma bien les portes et les fenêtres pour n’être pas entendus, et l’on prit la résolution de convier à la naissance de l’enfant, toutes les fées à mille lieues à la ronde. L’on fit partir en même temps des courriers, et l’on écrivit aux fées de belles lettres fort civiles, pour qu’elles prissent la peine de venir aux couches de la reine, et de tenir l’affaire secrète ; car l’on tremblait de peur que Carabosse n’en fût avertie, et qu’elle ne vînt faire du grabuge. Pour récompense de leurs peines, on leur promettait une hongreline de velours bleu, un cotillon de velours amarante, des pantouffles de satin cramoisi tailladé, de petits ciseaux dorés, et un étui plein de fines aiguilles.

Dès que les courriers furent partis, la reine commença de travailler avec ses demoiselles et ses servantes à tout ce qu’elle avait promis aux fées ; elle en connaissait plusieurs, mais il n’en vint que cinq. Elles arrivèrent dans le moment que la reine venait d’avoir une petite princesse. Voilà qu’elles s’enferment vitement pour la douer. La première la doua d’une beauté parfaite ; la seconde, d’avoir infiniment d’esprit ; la troisième, de chanter merveilleusement bien ; la quatrième, de faire des ouvrages en prose et en vers.