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LA PRINCESSE

que de me donner cette satisfaction. » À ces mots, la nourrice et les autres recommencèrent à pleurer encore plus fort ; et toutes résolurent de lui faire voir Fanfarinet, ou de mourir à la peine. Elles passèrent le reste de la nuit à proposer des expédiens, sans en trouver ; et Printanière, qui se désespérait, disait sans cesse : « Ne me faites plus accroire que vous m’aimez ; si vous m’aimiez, vous trouveriez bien de bons moyens : j’ai lu que l’amour et l’amitié viennent à bout de tout. »

Enfin, elles conclurent qu’il fallait faire un trou à la tour, du côté de la ville par où Fanfarinet devait venir. Elles dérangèrent le lit de la princesse, et aussitôt elles se mirent toutes à travailler, sans cesser jour et nuit. À force de gratter, elles ôtaient le plâtre, et puis les petites pierres. Elles en ôtèrent tant, qu’elles firent un trou par où l’on pouvait passer une petite aiguille avec bien de la peine.

Ce fut par-là que Printanière aperçut le jour pour la première fois : elle en demeura éblouie ; et comme elle regardait sans cesse au petit trou, elle vit paraître Fanfarinet à la tête de toute sa troupe. Il était monté sur un cheval blanc, qui dansait, au son des trompettes, et qui sautait à merveille ; six joueurs de flûte allaient devant ; ils jouaient les plus beaux airs de l’opéra, et six hautbois répondaient par échos ; puis, les trompettes et les timbales faisaient grand bruit. Fanfarinet avait un habit tout en broderies, des perles, des bottes d’or, des plumes incarnates, des rubans partout, et tant de diamans (car le roi Merlin en avait des chambres pleines), que le soleil brillait moins que