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LA PRINCESSE

avec ses chauve-souris. En même temps la belle descendit jusqu’à terre, et s’adressant à Printanière :

« Ne craignez point, aimable princesse, lui dit-t-elle, je ne viens en ces lieux que pour vous obliger : le combat que j’ai eu contre Carabosse, n’a été que pour l’amour de vous. Elle voulait avoir l’autorité de vous donner le fouet, parce que vous êtes sortie de la tour quatre jours avant les vingt ans ; mais vous avez vu que j’ai pris votre parti, et que je l’ai chassée ; jouissez du bonheur que je vous ai acquis. » La princesse reconnaissante, se prosterna devant elle : « Grande reine des fées, lui dit-elle, votre générosité me ravit, je ne sais comment vous remercier ; mais je sens bien que je n’ai pas une goutte de ce sang que vous venez de conserver, qui ne soit à votre service. » La fée l’embrassa trois fois, et la rendit encore plus belle qu’elle n’était (en cas que ce fût une chose possible). Elle ordonna à son coq d’aller aux vaisseaux du roi, dire à l’amiral de venir sans crainte ; elle envaya le poulet gras à son palais ; querir les plus beaux habits du monde pour Printanière.

L’amiral, aux nouvelles que lui dit le coq, demeura si ravi, qu’il en pensa être malade. Il vint promptement dans l’île avec tout ses gens, et jusqu’à Jean Caquet, qui, voyant la précipitation avec laquelle chacun descendait des vaisseaux, se hâta comme les autres, et prit sur son épaule une broche, qui était toute chargée de gibier.