Page:Aulnoy - Contes des Fées (éd. Corbet), 1825.djvu/218

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
206
LA PRINCESSE

la belle reine Rosette, » quand ils l’aperçurent si horrible, ils criaient : « Fi, fi, qu’elle est laide ! » Elle enrageait de dépit, et disait à ses gardes : « Tuez ces coquins de paons qui me chantent des injures. » Les paons s’envolaient bien vite, et se moquaient d’elle.

Le fripon de batelier qui voyait tout cela, disait tout bas à la nourrice : « Commère, nous ne sommes pas bien ; votre fille devrait être plus jolie. » Elle lui répondit : « Tais-toi, étourdi ; tu nous porteras malheur. »

L’on fut avertir le roi que la princesse approchait. « Hé bien, dit-il, ses frères m’ont-ils dit vrai ? Est-elle plus belle que son portrait ? — Sire, dit-on, c’est bien assez qu’elle soit aussi belle. — Oui-dà, dit le roi, j’en serai bien content : allons la voir. » Car il entendit par le grand bruit que l’on faisait dans la cour, qu’elle arrivait, et il ne pouvait rien distinguer de ce que l’on disait, sinon : « Fi, fi qu’elle est laide ! » Il crut qu’on parlait de quelque naine ou de quelque bête qu’elle avait peut-être amenée avec elle ; car il ne pouvait lui entrer dans l’esprit que ce fût effectivement d’elle-même.

L’on portait le portrait de Rosette au bout d’un grand bâton, tout découvert ; et le roi marchait gravement après, avec tous ses barons et tous ses paons, puis les ambassadeurs des royaumes voisins. Le roi des Paons avait grande impatience de voir sa chère Rosette. Dame quand il l’aperçut, peu s’en fallut qu’il ne