LES CONTES
DES FÉES.
Après avoir éprouvé tout ce qu’un long hiver
a de plus rigoureux, le retour de la belle saison
invita plusieurs personnes d’esprit et de bon
goût d’aller à Saint-Cloud. Tout y fut admiré,
tout y fut loué. Madame D… qui s’était lassée
plus vite que le reste de la compagnie, s’assit
au bord d’une fontaine. « Laissez-moi ici, dit
elle, peut-être que quelque Sylvain ou quelque
Dryade ne dédaigneront pas de venir m’entretenir. »
Chacun lui fit la guerre sur sa paresse.
Cependant l’impatience de voir mille belles choses
qui s’offraient aux yeux, l’emporta sur l’envie
qu’on aurait eu de rester avec elle. « Comme la
conversation que vous méditez avec les hôtes de
ces bois, n’est pas bien certaine, lui dit M. de
Saint-P…, je vais vous donner les Contes
des fées, qui vous occuperont agréablement.
— Il faudrait que je ne les eusse pas écrits,
répliqua madame D…, pour me laisser au
moins prévenir par les grâces de la nouveauté ;
mais laissez-moi ici sans scrupule, je n’y serai
point désœuvrée. »
Elle continua ses instances là-dessus d’une manière si pressante, que cette charmante troupe s’éloigna. Après avoir tout parcouru, elle re-