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LE NAIN

L’on était au comble de la joie : les rivaux du roi, désespérés de sa bonne fortune, avaient quitté la cour ; ils étaient retournés chez eux accablés de la plus vive douleur, ne pouvant être témoins du mariage de Toute-Belle ; ils lui dirent adieu d’une manière si touchante, qu’elle ne put s’empêcher de les plaindre. « Ah ! madame, lui dit le roi des mines d’or, quel larcin me faites-vous aujourd’hui ! Vous accordez votre pitié à des amans qui sont trop payés de leurs peines par un seul de vos regards. — Je serais fâchée, répliqua Toute-Belle, que vous fussiez insensible à la compassion que j’ai témoignée aux princes qui me perdent pour toujours ; c’est une preuve de votre délicatesse dont je vous tiens compte ; mais, seigneur, leur état est si différent du vôtre ; vous devez être si content de moi ; ils ont si peu de sujet de s’en louer, que vous ne devez pas pousser plus loin votre jalousie. » Le roi des mines d’or, tout confus de la manière obligeante dont la princesse prenait une chose qui pouvait la chagriner se jeta à ses pieds, et lui baisant les mains, il lui demanda mille fois pardon.

Enfin, ce jour tant attendu et tant souhaité arriva : tout étant prêt pour les noces de Toute-Belle, les instrumens et les trompettes annoncèrent par toute la ville cette grande fête ; l’on tapissa les rues, elles furent jonchées de fleurs, le peuple en foule accourut dans la grande place du palais ; la reine, ravie s’était à peine couchée et elle se leva plus matin que l’aurore, pour