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SERPENTIN

seulement la permission de parler ailleurs que chez eux.

La perte de la princesse n’avait pas laissé que de trouver de la sensibilité dans ses proches ; on la croyait périe, de sorte que ses lettres furent infiniment agréables à la cour ; et la reine qui mourait d’envie de la revoir, ne différa pas un moment à partir avec sa fille et son gendre. Les pagodes, qui savaient seuls le chemin de leur royaume, y conduisirent toute la famille royale ; et lorsque Laidronette vit ses parens, elle en pensa mourir de joie. Elle lut et relut Psyché, pour être en garde sur tout ce qu’on lui disait et sur tout ce qu’elle devait répondre ; mais elle eut beau faire elle s’égara en cent endroits ; tantôt le roi était à l’armée, tantôt il était malade, et de si mauvaise humeur, qu’il ne voulait voir personne, tantôt il faisait un pèlerinage, puis il était à la chasse ou à la pêche. Enfin il semblait qu’elle était gagée pour ne rien dire qui vaille, et que la barbare Magotine lui avait renversé l’esprit. Sa mère et sa sœur en raisonnèrent ensemble, il fut conclu qu’elle les trompait et que peut-être elle se trompait elle-m^me, de sorte que par un zèle assez mal réglé, elles résolurent de lui parler : elles s’en acquittèrent avec tant d’adresse, qu’elles jetèrent dans son esprit milles craintes et mille doutes ; Après s’être long-temps défendue de convenir de ce qu’elles lui disaient, elle avoua que jusqu’alors elle n’avait point vu son époux, mais qu’il avait tant de charmes dans sa con- même,