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SERPENTIN

rels ; mais d’un coup de baguette, la fée Protectrice les rendit plus doux que des agneaux.

Elle n’attendit pas que la reine reconnaissante l’eût remerciée, pour achever de lui faire tout le plaisir qui dépendait d’elle. Elle lui donna un petit chariot trainé par deux serins blancs, qui parlaient et qui sifflaient à merveille ; elle lui dit de descendre la montagne, de jeter ses souliers de fer contre deux géans armés de massues, qui gardaient la fontaine, qu’ils tomberaient sans aucun sentiment ; qu’elle donnât sa cruche aux petits serins, qu’ils trouveraient bien le moyen de l’emplir de l’eau de discrétion ; qu’aussitôt qu’elle en aurait, elle s’en frottât le visage, et qu’elle deviendrait la plus belle personne du monde ; qu’elle lui conseillait encore de ne point rester à la fontaine, de ne pas remonter sur la montagne, mais de s’arrêter dans un petit bois très-agréable, qu’elle trouverait sur son chemin ; qu’elle pouvait y passer trois ans ; que Magotine croirait toujours qu’elle serait occupée à puiser de l’eau dans sa cruche, ou que les autres périls du voyage l’auraient fait mourir. La reine embrassa les genoux de la fée Protectrice, elle la remercia cent fois des faveurs particulières qu’elle en recevait. « Mais, ajouta-t-elle, madame, les heureux succès que je devais avoir, ni la beauté que vous me promettez, ne sauraient me toucher de joie, jusqu’à ce que Serpentin ait récouvré sa première forme. — C’est ce qui arrivera après que vous aurez été trois ans au bois de la montagne, lui dit la fée, et qu’à