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BIENFAISANTE.

Mais il est temps de parler du roi. Pendant que ses ennemis le tenaient assiégé dans sa ville capitale, il ne pouvait envoyer sans cesse des courriers à la reine : cependant ayant fait plusieurs sorties, il les obligea de se retirer, et il ressentit bien moins le bonheur de cet événement, par rapport à lui, qu’à sa chère reine, qu’il pouvait aller querir sans crainte. Il ignorait son désastre, aucun de ses officiers n’avait osé l’en aller avertir. Ils avaient trouvé dans la forêt le chariot en pièces, les chevaux échappés et toute la parure d’amazone qu’elle avait mise pour l’aller trouver.

Comme ils ne doutèrent point de sa mort, et qu’ils crurent qu’elle avait été dévorée, il ne fut question entr’eux que de persuader au roi qu’elle était morte subitement. À ces funestes nouvelles, il pensa mourir lui-même de douleur ; cheveux arrachés, larmes répandues, cris pitoyables, sanglots, soupirs, et autres menus droits du veuvage, rien ne fut épargné en cette occasion.

Après avoir passé plusieurs jours sans voir personne, et sans vouloir être vu, il retourna dans sa grande ville, traînant après lui un long deuil, qu’il portait mieux dans le cœur que dans ses habits. Tous les ambassadeurs des rois ses voisins vinrent le complimenter ; et après les cérémonies, qui sont inséparables de ces sortes de catastrophes, il s’attacha à donner du repos à ses sujets, en les exemptant de guerre, et leur procurant un grand commerce.