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LA CHATTE

plus savante qu’il n’est permis à une Chatte de l’être. Le prince s’en étonnait quelquefois. « Non, lui disait-il, ce n’est point une chose naturelle que tout ce que je remarque de merveilleux en vous : si vous m’aimez, charmante Minette, apprenez-moi par quel prodige vous pensez et vous parlez si juste, qu’on pourrait vous recevoir dans les académies fameuses des plus beaux esprits ? — Cesse tes questions, fils de roi, lui disait-elle, il ne m’est pas permis d’y répondre, et tu peux pousser les conjectures aussi loin que tu voudras, sans que je m’y oppose ; qu’il te suffise que j’ai toujours pour toi patte de velours, et que je m’intéresse tendrement dans tout ce qui te regarde. »

Insensiblement cette seconde année s’écoula comme la première ; le prince ne souhaitait guère de choses que les mains diligentes ne lui apportassent sur-le-champ, soit des livres, des pierreries, des tableaux, des médailles antiques ; enfin il n’avait qu’à dire je veux un tel bijou, qui est dans le cabinet du Mogol ou du roi de Perse, telle statue de Corinthe, où de la Grèce, il voyait aussitôt devant lui ce qu’il désirait, sans savoir ni qui l’avait apporté, ni d’où il venait. Cela ne laisse pas d’avoir ses agrémens ; et pour se délasser, l’on est quelquefois bien aise de se voir maître des plus beaux trésors de la terre.

Chatte Blanche, qui veillait toujours aux intérêts du prince, l’avertit que le temps de son départ approchait, qu’il pouvait se tranquilliser sur