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BLANCHE.

lit des fruits pour sa provision ; et comme ils ne se gâtent jamais, elle en fit charger quatre mille mulets qu’elle emmena. Les fées ajoutèrent à leurs fruits des corbeilles d’or, d’un travail exquis, pour les mettre, et plusieurs raretés dont le prix est excessif. Elles lui promirent de m’élever en princesse, de me rendre parfaite, et de me choisir un époux ; qu’elle serait avertie de la noce, et qu’elles espéraient bien qu’elle y viendrait.

» Le roi fut ravi du retour de la reine ; toute la cour lui en témoigna sa joie ; ce n’étaient que bals, mascarades, courses de bagues et festins, où les fruits de la reine étaient servis comme un régal délicieux. Le roi les mangeait préférablement à tout ce qu’on pouvait lui présenter. Il ne savait point le traité qu’elle avait fait avec les fées, et souvent il lui demandait en quel pays elle était allée pour en rapporter d’aussi bonnes choses ; elle lui répondait qu’ils se trouvaient sur une montagne presqu’inaccessible ; une autre fois qu’ils venaient dans des vallons, puis au milieu d’un jardin ou dans une grande forêt. Le roi demeurait surpris de tant de contrariétés. Il questionnait ceux qui l’avaient accompagnée ; mais elle leur avait tant défendu de conter à personne son aventure, qu’ils n’osaient en parler. Enfin la reine inquiète de ce qu’elle avait promis aux fées, voyant approcher le temps de ses couches, tomba dans une mélancolie affreuse ; elle soupirait à tout moment, et changeait à vue d’œil. Le roi s’inquiéta ; il pressa la reine de lui