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AUX CHEVEUX D’OR.

je veux te donner un grand équipage. — Cela n’est point nécessaire, répondit-il, il ne me faut qu’un bon cheval avec des lettres de votre part. » Le roi l’embrassa ; car il était ravi de le voir sitôt prêt.

Ce fut un lundi matin qu’il prit congé du roi et de ses amis, pour aller à son ambassade, tout seul, sans pompe et sans bruit. Il ne faisait que rêver aux moyens d’engager la Belle aux Cheveux d’Or d’épouser le roi ; il avait une écritoire dans sa poche, et quand il lui venait quelque belle pensée à mettre dans sa harangue, il descendait de cheval et s’asseyait sous des arbres pour écrire, afin de ne rien oublier. Un matin qu’il était parti à la petite pointe du jour, en passant dans une grande prairie, il lui vint une pensée fort jolie ; il mit pied à terre, et se plaça contre des saules et des peupliers, qui étaient plantés le long d’une petite rivière qui coulait au bord du pré. Après qu’il eut écrit, il regarda de tous côtés, charmé de se trouver en un si bel endroit. Il aperçut sur l’herbe une grosse carpe dorée qui bâillait et qui n’en pouvait plus ; car ayant voulu attraper de petits moucherons, elle avait sauté si haut hors de l’eau, qu’elle s’était élancée sur l’herbe, où elle était prête à mourir. Avenant en eut pitié ; et quoiqu’il fût jour maigre et qu’il eût pu l’emporter pour son dîner, il fut la prendre, et la remit doucement dans la rivière. Dès que ma commère la carpe sentit la fraicheur de l’eau, elle com-