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BLEU.

encore une autre princesse appelée Florine. « Oui, dit Truitonne, en la montrant avec le doigt ; la voilà qui se cache, tant elle est mal propre en guenilles. » Mais Florine rougit, et devint si belle, si belle, que le roi Charmant demeura comme un homme ébloui. Il se leva promptement et fit une profonde révérence à la princesse : « Madame, lui dit-il, votre incomparable beauté vous pare trop pour que vous ayez besoin d’aucuns secours étrangers. — Seigneur, répliqua-t-elle, je vous avoue que je suis peu accoutumée à porter un habit aussi mal propre que l’est celui-ci ; et vous m’auriez fait plaisir de ne vous pas apercevoir de moi. — Il serait impossible, s’écria Charmant, qu’une si merveilleuse princesse pût être en quelque lieu, et que l’on eût des yeux pour d’autre que pour elle. — Ah ! dit la reine irritée, je passe bien mon temps à vous entendre ; croyez-moi, seigneur, Florine est déjà assez coquette, elle n’a pas besoin qu’on lui dise tant de galanterie. » Le roi Charmant démêla aussitôt les motifs qui faisaient ainsi parler la reine ; mais comme il n’était pas de condition à se contraindre, il laissa paraître toute son admiration pour Florine, et l’entretint trois heures de suite.

La reine au désespoir, et Truitonne inconsolable de n’avoir pas la préférence sur la princesse, firent de grandes plaintes au roi et l’obligèrent de consentir que, pendant le séjour du roi Charmant, l’on enfermerait Florine dans une tour, où ils ne se verraient point.