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BLEU.

ton railleur. Voyez-vous qu’on a tort de ne pas prendre une si belle personne pour sa femme ! — Non, non, elle ne la sera pas, s’écria Soussio en colère, tu n’as qu’à t’envoler par cette fenêtre, si tu veux, car tu seras sept ans Oiseau Bleu. »

En même temps le roi change de figure ; ses bras se couvrent de plumes et forment des ailes ; ses jambes et ses pieds deviennent noirs et menus ; il lui croît des ongles crochus ; son corps se rapetisse ; il est tout garni de longues plumes fines et mêlées de bleu céleste ; ses yeux s’arrondissent, et brillent comme des soleils ; son nez n’est plus qu’un bec d’ivoire, il s’élève sur sa tête une aigrette blanche qui forme une couronne, il chante à ravir et parle de même. En cet état il jette un cri douloureux de se voir ainsi métamorphosé, et s’envole à tire d’aile, pour fuir le funeste palais de Soussio.

Dans la mélancolie qui l’accable, il voltige de branche en branche, et ne choisit que les arbres consacrés à l’amour ou à la tristesse, tantôt sur les myrtes, tantôt sur les cyprès ; il chante des airs pitoyables, où il déplore sa méchante fortune et celle de Florine. « En quel lieu ses ennemis l’ont-ils cachée ? disait-il. Qu’est devenue cette belle victime ? La barbarie de la reine la laisse-t-elle encore respirer ? Où la chercherai-je ? Suis-je condamné à passer sept ans sans elle ? Peut-être que, pendant ce temps, on la mariera, et que je perdrai pour jamais l’espérance qui soutient ma vie. » Ces différentes