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FINETTE CENDRON

d’apparence qu’il vînt un arbre dans un pays où il n’y en avait point ; on n’y voyait que des choux et des laitues, dont les princesses mangeaient ; si elles avaient été bien délicates, elles seraient mortes cent fois ; elles couchaient presque toujours à la belle étoile ; tous les matins et tous les soirs elles allaient tour à tour arroser le gland, et lui disaient : « Croîs, croîs, beau gland ; il commença de croître à vue d’œil.

Quand il fut un peu grand, Fleur-d’Amour voulut monter dessus, mais il n’était pas assez fort pour la porter ; elle le sentait plier sous elle, aussitôt elle descendit. Belle-de-Nuit eut la même aventure ; Finette plus légère s’y tint longtemps, et ses sœurs lui demandèrent : Ne vois-tu rien, ma sœur ? Elle leur répondit : Non, je ne vois rien. — Ah ! c’est que le chêne n’est pas assez haut, disait Fleur-d’Amour ; de sorte qu’elles continuaient d’arroser le gland et de lui dire : Croîs, croîs, beau gland. Finette ne manquait jamais d’y monter deux fois par jour. Un matin qu’elle y était, Belle-de-Nuit dit à Fleur-d’Amour : « J’ai trouvé un sac que notre sœur nous a caché ; qu’est-ce qu’il peut y avoir dedans ? Fleur-d’Amour répondit : Elle m’a dit que c’était de vieilles dentelles qu’elle raccommode. — Et moi, je crois que c’est du bonbon, ajouta Belle-de-Nuit. Elle était friande, et voulut y voir ; elle y trouva effectivement toutes les dentelles du roi et de la reine, mais elles servaient à cacher les beaux habits de Finette et la boîte de diamants. Eh bien, se peut-il une plus grande petite coquine ! s’écria-t-elle ; il faut prendre tout pour nous, et mettre des pierres à la place. Elles le firent promptement.