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L’OISEAU BLEU.

tout comme je faisais ordinairement ? — Oh ! s’écria son ami, la chose est difficile ! Tel qui veut obéir à un homme, ne veut pas obéir à un perroquet ; tel vous craint étant roi, étant environné de grandeur et de faste, qui vous arrachera toutes les plumes, vous voyant un petit oiseau. — Ah ! brillant extérieur ! s’écria le roi, encore que tu ne signifies rien pour le mérite et pour la vertu, tu ne laisses pas d’avoir des endroits décevants, dont on ne saurait se défendre ! Hé bien, continua-t-il, soyons philosophes, méprisons ce que nous ne pouvons obtenir, notre parti ne sera point le plus mauvais. — Je ne me rends pas sitôt, dit le magicien, j’espère de trouver quelques bons expédients.

Florine, la triste Florine, désespérée de ne plus voir le roi, passait les jours et les nuits à sa fenêtre, répétant sans cesse :


Oiseau Bleu, couleur du temps,
Vole à moi promptement.


La présence de son espionne ne l’en empêchait point ; son désespoir était tel, qu’elle ne ménageait plus rien. Qu’êtes-vous devenu, roi Charmant ? s’écriait-elle. Nos communs ennemis vous ont-ils fait ressentir les cruels effets de leur rage ? Avez-vous été sacrifié à leurs fureurs ? Hélas ! hélas ! n’êtes-vous plus ? Ne dois-je plus vous voir ? ou, fatigué de mes malheurs, m’avez-vous abandonnée à la dureté de mon sort ? La princesse abattue, malade, maigre et changée, pouvait à peine se soutenir ; elle était persuadée que tout ce qu’il y a de plus funeste était arrivé au roi.