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LA CHATTE BLANCHE.

jour à vivre, ainsi je perdrais mon enfant en me perdant.

Alors la fée la toucha avec une petite baguette d’or, en disant : Que ta majesté soit quitte de tous les maux qui la retiennent dans ce lit. Il lui sembla aussitôt qu’on lui ôtait une robe fort pesante et fort dure, dont elle se sentait comme accablée, et qu’il y avait des endroits où elle tenait davantage : C’était apparemment ceux où le mal était le plus grand. Elle fit appeler toutes ses dames, et leur dit, avec un visage gai, qu’elle se portait à merveille, qu’elle allait se lever, et qu’enfin ces portes si bien verrouillées et si bien barricadées du palais de féerie lui seraient ouvertes pour manger de beaux fruits ; et pour en emporter tant qu’il lui plairait. Ses femmes l’habillèrent promptement, et elle se hâtá de suivre la vieille fée qui l’avait toujours attendue.

Elle entra dans le palais, où rien ne pouvait être ajouté pour en faire le plus beau lieu du monde. Vous le croirez aisément, seigneur, ajouta la reine Chatte blanche, quand je vous aurai dit que c’est celui où nous sommes ; deux autres fées, un peu moins vieilles que celle qui conduisait ma mère, la reçurent à la porte et lui firent un accueil très favorable. Elle les pria de la mener promptement dans le jardin, et vers les espaliers où elle trouverait les meilleurs fruits.

Nous y consentons volontiers, dirent les trois fées ; mais souviens-toi de la promesse que tu nous as faite, il ne te sera plus permis de t’en dédire. Je suis persuadée, répliqua-t-elle, que l’on est si bien avec vous, et ce palais me semble si beau, que si je n’aimais pas chèrement le roi