apporte deux faucilles, l'une pour moi, l'autre pour toi, et nous
couperons nos blés nous-mêmes demain. » A peine les petits ont-ils
rapporté ces paroles à leur mère, que celle-ci s'écrie : « C'est
maintenant qu'il faut déloger et se retirer d'ici, car, sans aucun
doute, le maître fera ce qu'il a dit, puisque l'afiaire est entre les
mains de celui qu'elle intéresse, et qu'il ne la confie à personne. »
Là-dessus l'alouette abandonna son nid, et le maître vint moissonner
son champ. » Telle est la fable qu'Ésope a composée pour
montrer combien peu l'on doit compter sur les secours des amis
et des proches. Les livres des philosophes nous donnent-ils des
enseignements plus sages ? ne nous avertissent-ils pas de chercher
toutes nos ressources en nous, de ne jamais regarder
comme notre bien, comme notre propriété ce qui est indépendant
de notre volonté ?
Cet apologue d'Ésope a été imité par Q. Ennius, dans ses satires, dans des vers ïambiques de huit pieds, pleins d'élégance et de grâce. Les deux vers qui terminent cette pièce ne sont pas indignes, à mon avis, d'être appris par cœur; les voici :
« Ayez toujours cette maxime présente à l'esprit : ne demandez pas à vos amis une chose que vous pouvez faire vous-même. »