Page:Aurel - Sans halte.djvu/38

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POUR DEUX YEUX


Il se fit un remous dans l’air de ma pensée
Qui la fit dévier de sa route insensée.

De la gerbe au triomphe grave des chrysanthèmes chevelus, de ces rares ors verts, si étrangement jeunes entre ceux lassés de rousseurs, Suzanne un peu s’éloigne. Elle se penche, écoute de quel côté leur voix de lumière calmée lui chante mieux l’automne.

Elle attend, elle croit surprendre en l’allégresse qui lui vient par bouffées des fleurs généreuses, la puissance de l’exprimer.

Les pinceaux attirants sont là — Fanatique de son plaisir, elle en cherche la forme, mais le maîtrisant mal, craintive qu’il ne fuie, elle masse en hâte la pulpe dès ors jeunes et des ors tristes.

Son visage flou s’ossifie, et longtemps ainsi, elle lutte.

Mais le jour s’épuise avant elle, et le définitif mystère de la nuit assourdit la dernière fleur dont la cantilène esseulée la retint longtemps haletante.

Elle porte vers plus de jour la toile qui mourait aussi, et qui s’éveille, peu à peu, de quelle troublante clarté : « Mon Dieu ! mais c’est de Jean, dit-elle, ses intentions ceci, ses habitudes même.