Page:Austen - La Famille Elliot T1.djvu/168

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me prendre avec lui. J’ai vécu quelques mois dans une crainte perpétuelle : tous les malheurs se présentaient à mon imagination ; je ne savais que devenir, ni quand je pourrais avoir de ses nouvelles. Je lui fis bien promettre à son retour de ne pas aller sur mer sans moi ; quand nous sommes ensemble, aucun mal ne peut m’atteindre. »

Voilà comme j’aurais été, pensait la pauvre Alice, voilà comme je serais encore ; mais… elle ne put s’empêcher de secouer tristement la tête ; personne ne faisait attention à elle ; on ne la vit pas.

« Je suis tout-à-fait de votre opinion, ma chère madame Croft, disait madame Musgrove ; rien n’est triste comme les séparations ; je sais ce que c’est. M. Musgrove va toujours aux assises à quelques milles d’ici ; c’est un triste temps, je vous assure ; je suis toujours charmée quand il est passé, et que je vois mon mari de retour sain et sauf. »

La soirée finit, comme à l’ordinaire, par la danse. Alice offrit ses services, qui furent acceptés ; quelquefois ses yeux étaient pleins de larmes ; elle était charmée d’être occupée machinalement, pour n’être pas observée.

La jeunesse était dans une grande gaîté, et