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PRÉFACE.

même inspiration familière, relevée çà et là d’un grain de morale et de philosophie.

L’heure ne me semble pas trop défavorable pour offrir au public ces petits poëmes.

Il est des époques malheureuses, soit lorsque les liens de la morale se détendent et qu’un luxe effréné se développe à l’ombre d’un despotisme aveugle et complaisant, soit au lendemain des grandes catastrophes nationales, inévitable suite de cette dissolution publique ; il est, disons-nous, des temps infortunés où la poésie aime à se réfugier aux champs. Désespérant alors de réveiller dans les cœurs les énergiques sentiments, les vieilles croyances, les saintes ou viriles passions qui en étaient la vie, elle peut du moins encore essayer d’y faire renaître l’amour des joies de la nature, des émotions paisibles de la solitude, des simples drames de la famille champêtre. Le désenchantement des esprits et leur lassitude semblent même favoriser ce retour aux contemplations et aux travaux de la vie rurale. C’est alors un besoin, c’est un devoir pour le poëte de montrer un lieu de retraite aux âmes fatiguées et désabusées, d’ouvrir un asile aux naufragés des grandes crises sociales, de dire enfin à tant d’existences agglomérées au foyer corrupteur des villes : « Sortez de cet air vicié ;