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LA VIE RURALE.

D’un hiver de six mois voici bientôt le terme.
Déjà plus d’un salon se dépeuple ou se ferme ;
Et les Italiens, gens épuisés de voix,
Donnaient hier Mosè pour la dernière fois.
Faisons comme eux : soufflons nos dernières bougies ;
Du rhume et de la toux cessons les élégies ;
Fuyons les plafonds bas et les murs étouffants,
Et partons, et surtout emmenons les enfants.

Emmenons les enfants ! Aux deux bords de la Seine,
Pour eux plus que pour nous l’atmosphère est malsaine.
À de si tendres cœurs, à de si doux esprits,
Abrégeons par pitié la prison de Paris.
Sauvons, d’un soin jaloux, sauvons ces purs organes
Du tableau des laideurs mesquines ou profanes ;
Sur ces premiers matins veillons pieusement !
Tout dépend ici-bas de son commencement.
Le jour sera mauvais si l’aurore est obscure ;
Amer sera le fruit, touché d’une piqûre ;
On trouble tout le fleuve en troublant le ruisseau ;
L’homme enfin tout entier se ressent du berceau !
L’enfant que l’on retient dans le cachot des villes
Porte en germe un cœur lâche et des membres débiles.
Qui de nous en passant n’a reconnu l’écueil,