Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

En France, l’ordre de bannissement fut diversement apprécié, selon le degré de crainte qu’ils inspiraient. Les encyclopédistes, se sentant délivrés d’ennemis redoutables, ne cachaient pas leur joie. Diderot, en particulier, écrivait à Sophie[1] : « Voilà, mon amie, le billet d’enterrement des Jésuites. Me voilà délivré d’un grand nombre d’ennemis puissants. Qui est-ce qui aurait deviné cet événement, il y a un an et demi ? Ils ont eu tant de temps pour prévenir ce coup, qu’il fallait, ou qu’ils eussent bien peu de crédit, ou que le roi eût bien résolu leur destruction : c’est le dernier qui est le plus vraisemblable. L’affaire du Portugal aura jeté sur l’affaire de France quelques lueurs qui les aura montrés au monarque sous un aspect odieux ; il aura attendu le moment de se défaire de gens qui l’avaient frappé, et qu’il voyait, sans cesse, la main levée sur lui ; celui de la banqueroute scandaleuse du père la Valette aura paru favorable ; ils se mêlaient de trop d’affaires. Depuis environ deux cents ans qu’ils existent, il n’y en a presque pas un qui n’ait été marqué par quelque forfait éclatant. Ils brouillaient l’Église et l’État. Soumis au despotisme le plus outré dans leurs maisons, ils en étaient les prôneurs les plus abjects dans la société ; ils prêchaient au peuple la soumission aveugle aux rois, l’infaillibilité du pape, afin que maîtres d’un seul, ils fussent maîtres de tous. Ils ne reconnaissaient d’autre autorité que celle de

  1. 12 août 1762.