Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/211

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Comparaison, ajoute Diderot, qui leur parut d’autant plus juste, qu’ainsi que les oies romaines, les nôtres gardent le Capitole et ne le défendent pas[1]. »

Depuis qu’il avait été l’objet des bontés de l’Impératrice, Diderot caressait le projet d’aller la remercier. Enfin, le 10 mai 1873, il partit pour la Haye, où il devait prendre M. de Nariskin, chambellan de Catherine, et continuer avec lui son voyage en Russie. Un autre motif l’attirait à la Haye. M. de Galitzin, après quelque temps de disgrâce, avait été nommé par Catherine II, ambassadeur en Hollande, et le Philosophe se faisait un plaisir de revoir son ami et son bienfaiteur. Le prince avait épousé, en 1768, une jeune Allemande, et ce mariage paraît ne pas avoir été étranger au mécontentement de sa souveraine. La princesse était, au dire de Diderot, une femme très-vive, très-gaie,très-spirituelle et d’une figure assez aimable ; « plus qu’assez jeune, instruite et pleine de talents ; elle a lu ; elle sait plusieurs langues ; c’est l’usage des Allemandes ; elle joue du clavecin et chante comme un ange ; elle est pleine de mots ingénus et piquants ; elle est très-bonne : elle disait hier à table que la rencontre des malheureux est si douce, quand on peut leur venir en aide, qu’elle pardonnerait volontiers à la Providence d’en avoir jeté quelques-uns dans les rues. Nous avions un butor qui se repen-

  1. Voltaire n’avait pas grande confiance dans la compétence des assemblées, parlementaires ou académiques. Il disait à propos de celle-ci : « Quand les hommes sont réunis, leurs oreilles s’allongent. »