Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/54

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le bonheur, devint bientôt le théâtre de ses plus grandes fautes et la source de tous ses malheurs, par suite de la passion doublement coupable que lui inspira madame d’Houdetot.

Lorsque le comte d’Houdetot épousa la sœur de M. d’Épinay, mademoiselle la Live de Bellegarde, il était épris d’une dame qu’il ne cessa jamais d’aimer. Aussi, malgré toutes les qualités qui embellissaient sa jeune femme, n’éprouva-t-il pour elle que de l’indifférence ; il n’exigeait d’elle que le respect des convenances, comme on les entendait alors, c’est-à-dire qu’il tenait à ce que les liaisons de sa femme ne fussent pas scandaleuses ; c’est sans doute ce qui la porta à l’oubli de ses devoirs, malgré son naturel tendre et constant[1]. En 1756, sa liaison avec Saint-Lambert était encore toute récente.

Le marquis de Saint-Lambert, le futur auteur

  1. Bien longtemps après, M. d’Houdetot disait spirituellement : « Nous avions, ma femme et moi, la vocation de la fidélité ; seulement, il y a eu un malentendu. » Madame la vicomtesse d’Allard, dans ses Anecdotes pour servir de suite aux Mémoires de madame d’Épinay, s’exprime ainsi au sujet de madame d’Houdetot qu’elle avait beaucoup connue : « Ce sera une consolation pour les femmes laides, d’apprendre que madame d’Houdetot, qui l’était beaucoup, a dû à son esprit et surtout à son charmant caractère d’être si parfaitement et si constamment aimée ; elle avait non-seulement la vue basse et les yeux ronds, comme le dit Rousseau, mais elle était extrêmement louche, ce qui empêchait que son âme ne se peignît dans sa physionomie ; son front était très-bas, son nez gros ; la petite vérole avait laissé une teinte jaune dans tous ses creux, et ses joues étaient marquées de brun : cela donnait un air sale à son teint, qui, je crois, était beau avant cette maladie. »