Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/99

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écrivait à son amie : « Il y a six mois qu’on s’étouffait à la comédie des Philosophes ! qu’est-elle devenue ? Elle est au fond de l’abîme qui reste ouvert aux productions sans mœurs et sans génie, et l’ignominie est restée à l’auteur. »

Dans le Père de famille, dont Voltaire vante à Palissot la dédicace, Diderot avait complété ses vues sur la manière dont il comprenait le théâtre. Son Essai sur la Poésie dramatique, dédié à Grimm, explique l’objet qu’il s’était proposé dans ses pièces : « J’ai essayé, dit-il, de donner dans le Fils naturel l’idée d’un drame qui fût entre la comédie et la tragédie. Le Père de famille, que je promis alors et que des distractions continuelles ont retardé, est entre le genre sérieux et la comédie ; et si jamais j’en ai le loisir et le courage, je ne désespère pas de composer un drame qui se place entre le genre sérieux et la tragédie. »

Voici, aux yeux du philosophe, le système dramatique dans toute son étendue : « La comédie gaie, qui a pour objet le ridicule et le vice ; la comédie sérieuse, qui a pour objet la vertu et les devoirs de l’homme ; la tragédie qui aurait pour objet nos malheurs domestiques, et la tragédie qui a pour objet les catastrophes publiques et les malheurs des grands[1]. »

  1. Sédaine, que Collé appelait très-judicieusement le Greuze du théâtre, était de tous les auteurs dramatiques contemporains de Diderot, celui qu’il préférait. Il faut voir avec quel enthousiasme il parle du Philosophe sans le savoir : « Oui, mon ami, écrit-il à Grimm. Voilà le vrai goût, voilà la vérité domestique,