Page:Azaïs - Jugement philosophique sur J.J. Rousseau et sur Voltaire.djvu/26

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

que le roseau suit paisiblement son obscure destinée, il faut couper cet arbre vigoureux, il faut faire des lois, fonder des institutions, établir des principes, qui retiennent sans cesse son développement à la surface de la terre ; il faut l’empêcher de vivre pour qu’il ne soit pas exposé à périr !… Ô imagination de l’homme sensible, c’est toi qu’il faut retenir, non à la surface de la terre, mais à cette élévation modérée d’où tes regards pourront embrasser les rapports des choses, découvrir leur ensemble, suivre dans leur exécution constante les lois simples, justes, admirables, qui font que tout s’unit, se coordonne, se balance, que tout est bien, même le mal, puisque le mal est nécessaire à la production du bien.

J.-J. Rousseau, comme tous les hommes de génie, avait une âme généreuse et franche ; si la vérité lui avait été montrée, son jugement l’aurait promptement saisie ; il l’aurait noblement proclamée il aurait abjuré hautement ses erreurs ; et ses pensées étaient loin d’être uniquement des erreurs. Pour les caractériser avec justesse il faut d’abord reconnaître que, sur un sujet quelconque, la vérité peut être représentée par une médaille à deux faces égales qui sont en parfaite correspondance, en sorte