Page:Azaïs - Jugement philosophique sur J.J. Rousseau et sur Voltaire.djvu/40

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odieux, vil et coupable, lui qui, profondément justifié par sa conviction et ses souvenirs, n’avait eu, comme écrivain, que les intentions les plus nobles, les plus pures, et ne formait encore que des vœux dont il croyait pouvoir s’honorer. Il ne devait donc point garder le silence. Sans doute, s’il eût été chrétien parfait, il aurait accepté, sans se plaindre, les malédictions des hommes ; mais, s’il eut été chrétien parfait, il n’eût point souffert de ces malédictions, ou même il ne les aurait point attirées ; un autre que lui aurait attaqué les vieilles habitudes, les vieux intérêts, les vieilles opinions.

J.-J. Rousseau, tel qu’il était, devait se défendre ; et, dans sa situation, lorsqu’il avait à repousser l’injustice de la génération contemporaine, et à prévenir l’injustice des générations futures, quel autre moyen lui restait que d’écrire sa vie entière avec une véracité fortement résolue, et avec tous les détails qu’il se rappelait ? Or, un grand nombre de personnes étaient nécessairement annexées à son histoire ; comment aurait-il pu ne parler que de lui seul ? Pour concilier la discrétion avec la justice qu’il était réduit à se rendre, il devait ne point nommer les personnes, et ordonner que ses