Page:Azaïs - Jugement philosophique sur J.J. Rousseau et sur Voltaire.djvu/53

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terre devait être considéré comme un voyageur. S’il était obligé de marcher sans interruption, et toujours avec vitesse, il succomberait bientôt ; sa course ne serait qu’un malheur continu. Il est nécessaire que, de temps en temps, il se repose ; non-seulement alors il respire et reprend haleine, ce qui est, pour lui, un temps de plaisir mais il répare ses forces. Au début de sa course nouvelle, les nouveaux lieux qu’il va parcourir, quoique ressemblans à ceux qu’il a traversés, ne lui paraîtront, pendant quelque temps du moins, ni désagréables ni difficiles.

Les hommes éclairés qui vivaient en France vers le milieu du dix-huitième siècle gémissaient et frémissaient justement de la tyrannie du fanatisme. Celui-ci était excité par le progrès des lumières à prendre une ardeur plus violente même que dans les temps d’ignorance ; il sentait que toute puissance allait lui échapper. Entre ses mains, l’opiniâtreté et la chaleur des hommes simples étaient toujours prêtes à devenir des instrumens terribles. Il était pressant d’en arrêter l’emploi. Mais l’ardeur de l’intolérance échauffait à son tour celle des passions qui lui étaient opposées, c’est-à-dire que, semblable à la religion, devenue violente