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« C’est, chez nous, qu’à vivre sans gêne
« S’instruisit le grand Diogène.
« Messieurs, l’homme fut en tout temps
« Le singe des orangs-outangs.

« L’homme a vu chez nous une armée,
« D’un centre et d’ailes bien formée,
« Ayant, sous les chefs les meilleurs,
« Garde, avant-garde et tirailleurs.
« Il n’avait pas mis Troie en cendre,
« Que nous comptions vingt Alexandre.
« Messieurs, l’homme fut en tout temps,
« Le singe des orangs-outangs.

« Avec bâton, épée ou lance,
« Tuer est l’art par excellence.
« Nous l’enseignons. Or dites-moi,
« Pourquoi l’homme est-il notre roi ?
« Grands dieux ! c’est fait pour rendre impie.
« Votre image est notre copie.
« Oui, dieux, l’homme fut en tout temps
« Le singe des orangs-outangs. »

Quoi ! dit Jupin, à mes oreilles,
Toujours, singes, castors, abeilles,
Crieront : C’est un ours mal léché,
Votre homme ; où l’avez-vous péché ?
Tout sot qu’il est, il me cajole.
Ôtons aux bêtes la parole ;
Car l’homme encor sera longtemps
Le singe des orangs-outangs.