Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 3.pdf/203

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« Que de couplets vit éclore la Fronde ! les baïonnettes n’y pouvaient rien.


Au Qui vive d’ordonnance
Alors prompte à s’avancer,
La chanson répondait : France !
Les gardes laissaient passer.


« Aujourd’hui qu’il n’y a plus de monarchie absolue, mais un de ces gouvernements nommés constitutionnels, les ministres ne peuvent pas supporter la plus légère opposition ; ils ne veulent pas que leur pouvoir soit tempéré même par des chansons.

« Leur susceptibilité est sans égale… Ils n’entendent pas la plaisanterie… et sous leur domination, il n’est plus vrai de dire : Tout finit par des chansons, mais tout finit par des procès.

« Nous allons donc plaider.

« Les chansons de M. Béranger sont déférées aux tribunaux.

« Monsieur l’avocat-général a fait de ces chansons le plus grand éloge auquel leur auteur pût aspirer : il a prétendu que ce n’étaient point de véritables chansons, mais des odes.

« Il est vrai qu’il n’a vu là qu’une altération du genre : à l’en croire, on ne devrait regarder comme chansons proprement dites que des ponts-neufs et les couplets de pure gaîté : nous, au contraire, nous trouvons ici un perfectionnement qui tient, pour les chansons comme pour tout le reste, à l’élan général de tous les esprits.

« Oui, j’en conviendrai, les chansons de Béranger ne sont pas des vers à Chloris ; plusieurs d’entre elles s’élèvent jusqu’à l’ode : excepté quelques rondes consacrées au vin et à l’amour, notre poëte célèbre plus volontiers la bravoure, la gloire, les