Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 3.pdf/319

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M. Champanhet, avocat du roi, prend ensuite la parole en ces termes :


« Il y a sept ans, lorsque, traduit devant des jurés et accusé par la bouche éloquente d’un magistrat enlevé trop tôt à la carrière du ministère public qu’il illustrait, le sieur de Béranger encourut une condamnation, juste mais modérée, pour des écarts d’une muse trop licencieuse, tous les bons esprits pensèrent que cet écrivain, corrigé par cette leçon, saurait désormais se prescrire la réserve que lui commandaient les lois, sa conscience et son propre intérêt ; mais loin de là, méprisant ou mettant en oubli un avertissement qui eût dû être salutaire, il est retombé dans de nouveaux excès ; des vers bien autrement répréhensibles que ceux qui furent frappés de la réprobation de la justice, le conduisent aujourd’hui devant vous comme il le fut devant la cour d’assises.

« Condamné alors pour avoir, dans ses rimes, outragé la morale publique et religieuse, il paraît devant vous sous cette même prévention, et de plus, il doit répondre d’autres vers outrageants pour la religion de l’état, offensants pour la personne du roi, sa dignité, son gouvernement. Ainsi le temps et l’exemple ont été perdus pour le sieur de Béranger, qui n’a pas craint d’aggraver de nouveaux torts par le souvenir des premiers.

« Comment un homme qui à l’esprit unit la raison sans doute, a-t-il pu ainsi, deux fois en si peu de temps, enfreindre de propos délibéré les lois de son propre pays, en ce qu’elles ont de plus saint et de plus respectable dans leurs prohibitions ? Est-ce un vain amour de cette célébrité décevante qui s’attache à tout ce qui a l’apparence d’un courage d’op-