Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 3.pdf/60

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Au Saint des saints le ciel rendant hommage,
De vos concerts doit emprunter les sons.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
        Et sa veillée et ses chansons !

Nos toits obscurs, notre église qui croule,
M’ont à moi-même inspiré des dédains.
Des monuments j’admire ici la foule ;
Surtout ce Louvre et ses pompeux jardins.
Palais magique, on dirait un mirage
Que le soleil colore à son coucher.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
        Et ses chaumes et son clocher !

Convertissez le sauvage idolâtre ;
Près de mourir, il retourne à ses dieux.
Là bas, mon chien m’attend auprès de l’âtre ;
Ma mère en pleurs repense à nos adieux.
J’ai vu cent fois l’avalanche et l’orage,
L’ours et les loups fondre sur mes brebis.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
        Et la houlette et le pain bis !

Qu’entends-je, ô ciel ! pour moi rempli d’alarmes :
« Pars, dites-vous, demain pars au réveil.
« C’est l’air natal qui sèchera tes larmes ;
« Va refleurir à ton premier soleil. »
Adieu, Paris, doux et brillant rivage,
Où l’étranger reste comme enchaîné.
Ah ! je revois, je revois mon village,
        Et la montagne où je suis né.