Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 3.pdf/8

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n’appuyait. Mais le troisième jour, ô joie indicible ! M. Lucien m’appelle auprès de lui, s’informe de ma position, qu’il adoucit bientôt ; me parle en poëte et me prodigue des encouragements et des conseils. Malheureusement il est forcé de s’éloigner de la France. J’allais me croire oublié, lorsque je reçois de Rome une procuration pour toucher le traitement de l’Institut dont M. Lucien était membre, avec une lettre que j’ai précieusement conservée et où il me dit :

« Je vous adresse une procuration pour toucher mon traitement de l’Institut. Je vous prie d’accepter ce traitement, et je ne doute pas que, si vous continuez de cultiver votre talent par le travail, vous ne soyez un jour un des ornements de notre Parnasse. Soignez surtout la délicatesse du rhythme : ne cessez pas d’être hardi, mais soyez plus élégant, etc., etc. »

Jamais on n’a fait le bien avec une grâce plus encourageante ; jamais, en arrachant un jeune poëte à la misère, on ne l’a mieux relevé à ses propres yeux. Aux sages avis qui accompagnent de tels bienfaits, on sent que ce n’est pas la froide main d’une générosité banale qui vient vous tirer de l’abîme. Quel cœur n’en eût été vivement ému ! j’aurais voulu pouvoir rendre ma reconnaissance publique ;