Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 1.djvu/151

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Hannon captura trois, mais ne put rapporter que les peaux.

C’est d’un périple de cette espèce que sortirent, je crois, les aventures d’Ulysse dans la Mer du Couchant : si nos explorateurs de la Mer du Sud (c’est le nom que l’on donnait autrefois à notre océan Pacifique) et leurs journaux de bord n’avaient pas rendu populaires, au cours des xvie et xviie siècles, l’abandon et la vie solitaire de matelots sur une terre déserte ; si, au début du xviiie, l’Écossais Alexandre Selkirk n’avait pas été laissé sur l’île aux chèvres de Juan Fernandez et n’y avait pas vécu, quatre années et demie, sans voir figure humaine ; si Wood Roggers et Cook, qui l’en ramenèrent, n’avaient pas conté son histoire dans une relation de 1712, nous ne lirions pas aujourd’hui Robinson Crusoé, qui parut en 1719.

Nous ne lirions pas non plus dans l’Odyssée les « Récits d’Ulysse chez Alkinoos », si le Poète n’avait pas usé d’un périple ou de fragments de périple phénicien. L’existence de ces documents antérieurs est prouvée tant par le fond même et la matière des Récits que par leur texte, formules et expressions.

Je n’insisterai pas sur la langue : même dans une traduction, il apparaît aussitôt que le Poète