Page:Büchner - La Mort de Danton, trad. Dietrich, 1889.djvu/341

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se tourner vers Dieu. Il se mit à rire et répondit : « Oui, si j’étais assez heureux pour découvrir, comme vous, un passe-temps agréable, je pourrais remplir les journées de cette façon. Tout naît de l’oisiveté. La plupart prient par ennui, les autres s’aiment par ennui, ceux-ci sont vertueux, ceux-là vicieux, et moi rien du tout, rien du tout ; je ne veux même pas me tuer, c’est trop ennuyeux.

Ô Dieu ! dans le flot de ta lumière,
Dans la clarté de ton midi brûlant,
La veille a blessé mes yeux.
Ne fera-t-il donc plus jamais nuit ? »

Oberlin le regarda d’un air mécontent et s’apprêta à s’en aller. Lenz se glissa rapidement derrière lui, et, l’examinant d’un œil inquiétant : « Voyez-vous, fit-il, j’ai pourtant une idée ; malheureusement je ne puis distinguer si je rêve ou si je veille ; voyez-vous, c’est très important, il faut nous livrer à cette recherche. » Puis il regagna de nouveau son lit. L’après-dîner, Oberlin songea à faire une visite dans le voisinage ; sa femme était déjà sortie. Il se disposait à partir, quand on frappa à sa porte ; Lenz entra, le corps courbé en avant, la tête pendante, le visage entièrement couvert et l’habit parsemé çà et là de cendre, soutenant son bras gauche de sa main droite. Il pria Oberlin de lui tirer le bras ; il se l’était démis en se précipitant par la fenêtre ; personne ne l’ayant vu, il ne voulait le dire à personne. Oberlin s’effraya vivement, mais