Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/216

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es conformes à celles des grands hommes de l’antiquité, admirera la candeur et l’ingénuité de cét esprit élevé au dessus du commun, et lui fera justice de ses envieux qui refusent aujourd’huy de reconnoître son mérite. Car la corruption du genre humain est devenuë si grande, que comme un jeune homme auroit honte de paroître retenu, et tempérant dans une compagnie de gens débauchez de son âge, de même la plûpart du monde se mocque aujourd’huy d’une personne qui fait profession d’être sincére et véritable.

L’on prend beaucoup plus de plaisir à écouter de fausses accusations que de véritables loüanges, sur tout lors qu’il arrive à des gens de mérite de parler un peu avantageusement d’eux-mêmes. Car c’est pour lors que la vérité passe pour orgueil ; la dissimulation ou le mensonge pour modestie.

Il est aisé de juger par ces termes que M Descartes parloit de bonne foy pour la défense de son ami : et il se peut faire que M De Balzac ait eu autant de franchise, et d’ingénuité qu’il lui en attribuë dans les occasions qu’il prenoit de parler de luy-même. Mais nous avons vû de nos jours combien l’éxemple de M De Balzac a été pernicieux aux Narcisses de nôtre têms. Quoi que la malignité du siécle ait augmenté de plusieurs degrez depuis ce têms-là, il ne seroit peut-être pas impossible à des défenseurs aussi philosophes, je veux dire, aussi peu flateurs qu’un Descartes, de faire accepter leurs excuses au public, s’ils avoient au moins le mérite d’un Balzac.