Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/277

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Coste n’a marqué ce voyage qu’en l’an 1630, parce qu’il dura effectivement jusqu’au mois de septembre de cette année, et que cét auteur n’avoit pas entrepris d’entrer dans le détail des courses, et des autres actions du P Mersenne. De sorte que si dans les lettres que M Descartes, et M Gassendi écrivirent durant cét intervalle, l’on s’imagine voir le pére Mersenne au milieu de Paris, par la maniére dont il y est parlé de lui, il faut l’attribuer à l’industrie de ce pére, qui sçavoit servir ses amis par tout où il se trouvoit avec tant d’activité et de succés, qu’on ne s’apperçevoit pas de ses absences ni de ses empêchemens.

Ce pére étant à Dordrecht avoit eu de longs entretiens avec le Sieur Béeckman sur le sujet de M Descartes, qu’il sçavoit être son ami particulier depuis plusieurs années. Le discours étoit souvent tombé sur les connoissances favorites de ce pére, je veux dire sur la musique, et tout ce qui concerne les sons. Béeckman n’avoit rien dans son cabinet qui pût lui être plus agréable que la copie du petit traitté de musique que M Descartes avoit autrefois composé en sa considération lors qu’il étoit en garnison dans la ville de Breda, où ils avoient jetté les prémiers fondemens de leur amitié. Les honnêtetez et les témoignages d’estime dont le P Mersenne accompagnoit les conférences qu’il avoit avec lui augmentérent un peu la bonne opinion que Béeckman avoit déja de lui même. Le P Mersenne étant sorti de Dordrecht continua de le traitter avec les mêmes civilitez dans les lettres qu’il lui écrivit, c’est ce qui fit croire enfin au Sieur Béeckman qu’il étoit effectivement tel que ce pére ne le dépeignoit que par compliment. La crainte de nuire à sa bonne fortune l’empêcha de démentir ce pére dans ses réponses : et croyant mettre le comble à sa réputation, il lui insinua dans une de ses lettres que M Descartes avoit appris de lui une bonne partie de ce qu’il sçavoit, tant sur la musique que sur la géométrie. Il colora cette vanité le mieux qu’il put par la vray-semblance qu’il établissoit sur leur ancien commerce de Breda, et sur le double de l’ âge de M Descartes, qui pouvoit lui former un extérieur de maître par rapport à la jeunesse de M Descartes. Mais Béeckman eut le malheur d’écrire ces pauvretez à un homme qui connoissoit M Desc