Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/297

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Il lui avoit rendu conte en même-têms des choses principales, qui étoient contenuës dans le livre. L’importance des matiéres et la considération de l’auteur excitérent dans M Descartes le desir d’avoir incessamment ce livre.

Mais en attendant que les libraires d’Amsterdam en fussent pourvûs, il récrivit au Pére Mersenne en ces termes. Si vous voyez le Pére Gibieuf, vous m’obligerez extrémement de lui témoigner combien je l’estime, lui et le Pére De Gondren, et combien je vous ai témoigné que j’approuvois et suivois les opinions que vous m’avez dit être dans son livre. Vous lui direz que je n’ai encore osé lui écrire, parce que je suis honteux de ne l’avoir encore pû recouvrer pour le lire, n’en ayant eu des nouvelles que depuis que vous avez été hors de Paris. Je ne serai pas fâché qu’il sçache aussi plus particuliérement que mes autres amis, que j’étudie à quelque autre chose qu’à l’art de tirer des armes. Pour les autres, vous m’avez obligé de leur parler comme vous avez fait, (en leur ôtant la pensée que j’aye aucun dessein de jamais rien faire imprimer de ma vie, et que je veüille étudier dans d’autres vuës que celle de mon instruction particuliére).

Le Pére Gibieuf n’avoit pas oublié M Descartes dans la distribution des présens qu’il vouloit faire de son livre à ses amis. Mais la commodité de lui faire tenir l’exemplaire qu’il lui avoit destiné, lui avoit toûjours manqué pendant tout le têms de l’absence du Pére Mersenne, qui étoit le seul en France qui sçût le lieu de la demeure de M Descartes. Ce pére ne manqua point de le lui envoyer à son retour avec d’autres livres, et ce qu’il avoit pû ramasser de nouveautez ou curiositez du têms selon sa coûtume. M Descartes reçût le paquet vers la fin de l’année ; et il répondit à ce pére vers le mois de février de l’année suivante, pour le remercier et lui dire sa pensée en ces termes. Je n’ai encore lû que fort peu du livre du Pére Gibieuf : mais j’estime beaucoup ce que j’en ai vû, et je souscris tout-à-fait à son opinion. M Reneri m’a prié de le lui prêter, ce qui m’a empêché de le lire tout entier. D’ailleurs, comme j’ai maintenant l’esprit rempli d’autres pensées, j’ai crû que je ne serois pas capable de bien entendre cette matiére, qui est à mon avis l’une