Page:Baju - L’Anarchie littéraire, 1892.djvu/26

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Maurice du Plessys a vu encore plus loin. Il croit, me dit-on, que la destruction des nationalités n’amènera pas immédiatement l’unité de la famille humaine ; d’après lui les hommes se grouperont d’abord par races et le Romanisme qui représente l’esprit des peuples latins serait une étape dans l’évolution sociale. (Il ne faudrait pas cependant attacher à ses théories sociologiques ou autres plus d’importance qu’il ne le fait lui-même. Son scepticisme à cet égard est tel qu’il se faisait un jeu de laisser passer sous son nom dans la France littéraire des articles dont il ne connaissait ni les termes, ni l’esprit. Jeux de prince… mais la moralité du fait n’en subsiste pas moins quant à son exactitude, ce n’est pas lui, certes, qui peut y contredire.)

Ernest Raynaud, brochant sur le tout, veut établir la supériorité du Midi sur le Nord, du Latin sur le Saxon. Il combat le Christianisme, qui est une cause d’affaiblissement cérébral chez les nations méditerranéennes et cherche à lui substituer le culte de la Beauté tel qu’on le pratiquait chez les Grecs.

Voilà les principales idées littéraires, philosophiques et sociales que préconisent les apôtres du Romanisme. Eh bien ! une telle littérature n’est pas en harmonie avec les progrès accomplis. La langue de Lafontaine et de Racine, quelque riche qu’elle soit, n’a pas la précision qui convient aux époques scientifiques. Le groupement des hommes par races est une utopie pour quiconque a la moindre connaissance des doctrines socialistes, et le culte de la Beauté préconisé par ce bon Raynaud, allez donc en parler à l’année des malheureux qui n’ont pas un morceau de pain à se mettre sous la dent. Non, tout cela est incohérent, sophistique, bourgeois. Le Romanisme n’a que les