Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/203

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influence. Au lieu de se tourner vers le peuple, et seulement vers le peuple, comme leurs devanciers de 1793, ils s’occupèrent uniquement de chercher à convertir à la république les classes privilégiées. Au lieu d’organiser partout la puissance populaire par le déchaînement des passions révolutionnaires, ils prêchèrent au prolétariat la modération, la tranquillité, la patience, et une confiance aveugle dans les desseins généreux du gouvernement provisoire. Les cercles réactionnaires de province, intimidés d’abord par cette révolution qui leur était tombée si inopinément sur la tête et par l’arrivée de ces commissaires de Paris, reprirent courage lorsqu’ils virent que ces Messieurs ne savaient faire que des phrases et avaient eux-mêmes peur du peuple ; et le résultat de la mission des commissaires de 1848 fut la triste Assemblée constituante que vous savez.

Après Juin, ce fut autre chose. Les bourgeois sincèrement révolutionnaires, ceux qui passèrent dans le camp du socialisme, sous l’influence de la grande catastrophe qui avait tué d’un seul coup tous les comédiens révolutionnaires de Février, devinrent des hommes sérieux et firent des efforts sérieux pour révolutionner la France. Ils réussirent même en grande partie. Mais il était trop tard ; la réaction de son côté s’était réorganisée avec une puissance formidable, et, grâce aux terribles moyens que donne la centralisation de l’État, elle finit par triompher tout à fait, plus même qu’elle ne l’avait voulu, dans les journées de Décembre.