Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/96

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contre Mme Limousin pour violation du secret des lettres.

N’est-ce pas sublime ? l’empire, ce violateur par excellence de toutes les choses réputées inviolables, le gouvernement de Napoléon III poursuivant une pauvre femme qui aurait violé le secret des lettres ! Comme si jamais, lui-même, il avait fait autre chose !

Mais ce qui est permis à L’État est défendu à l’individu. Telle est la maxime gouvernementale, Machiavel l’a dit, et l’histoire aussi bien que la pratique de tous les gouvernements actuels lui donnent raison. Le crime est une condition nécessaire de l’existence même de l’État, il en constitue donc le monopole exclusif, d’où il résulte que |12 l’individu qui ose commettre un crime est coupable deux fois : d’abord, contre la conscience humaine, mais ensuite et surtout contre l’État, en s’arrogeant l’un de ses plus précieux privilèges.

Nous ne discuterons pas la valeur de ce beau principe, base de toute politique d’État. Nous demanderons plutôt s’il est bien prouvé que Mme Limousin ait violé le secret des lettres ? Qui l’affirme ? Un tribunal impérial. Et vous croyez vraiment qu’on peut ajouter foi à un arrêt prononcé par un tribunal impérial ? Oui, dira-t-on, toutes les fois que ce tribunal n’aura aucun intérêt à mentir. Fort bien, mais c’est que l’intérêt existe dans cette occasion, et c’est le gouvernement impérial lui-même qui s’est chargé de l’apprendre au gouvernement fédéral.

C’est l’intérêt de M. Tourangin, sénateur de l’em-