Page:Bakounine - Œuvres t3.djvu/216

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les difficultés et de toutes les questions par l’argument victorieux de la guillotine.

Quand, pour extirper la réaction, on se contente d’attaquer ses manifestations, sans toucher à sa racine |87 et aux causes qui la produisent toujours de nouveau, on arrive forcément à la nécessité de tuer beaucoup de gens, d’exterminer, avec ou sans formes légales, beaucoup de réactionnaires. Il arrive fatalement, alors, qu’après en avoir tué beaucoup, les révolutionnaires se voient amenés à cette mélancolique conviction, qu’ils n’ont rien gagné, ni même fait faire un seul pas à leur cause ; qu’au contraire ils l’ont desservie et qu’ils ont préparé de leurs propres mains le triomphe de la réaction. Et cela pour une double raison : la première, c’est que les causes de la réaction ayant été épargnées, elle se reproduit et se multiplie sous des formes nouvelles ; et la seconde c’est que la tuerie, le massacre, finissent par révolter toujours ce qu’il y a d’humain dans les hommes et par faire tourner, bientôt, le sentiment populaire du côté des victimes.

La révolution de 1793, quoiqu’on en dise, n’était ni socialiste, ni matérialiste, ou, pour me servir de l’expression prétentieuse de M. Gambetta, elle n’était point du tout positiviste. Elle fut essentiellement bourgeoise, jacobine, métaphysique, politique et idéaliste. Généreuse et infiniment large dans ses aspirations, elle avait voulu une chose impossible : l’établissement d’une égalité idéale, au sein même de l’inégalité matérielle. En conservant, comme des