Page:Bakounine - Œuvres t3.djvu/232

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Non, elles ne le sont pas du tout. Qu’est-ce qui amène le capitaliste sur le marché ? C’est le besoin de s’enrichir, de grossir son capital, et de se procurer la satisfaction de toutes les ambitions et vanités sociales, de se donner toutes les jouissances imaginables. Qu’est-ce qui amène l’ouvrier ? C’est le besoin de manger aujourd’hui et demain, c’est la faim. Donc, égaux au point de vue de la fiction juridique, le capitaliste et l’ouvrier ne le sont pas du tout à celui de leur situation économique ou réelle. Le capitaliste n’est point menacé par la faim en arrivant au marché ; il sait fort bien que s’il n’y trouve pas aujourd’hui les travailleurs qu’il cherche, il aura toujours quelque chose à manger pendant beaucoup de temps, grâce à ce capital dont il est l’heureux possesseur. Si les ouvriers qu’il rencontre sur le marché lui font des propositions qui lui paraissent exagérées, parce que, loin de grossir sa fortune et d’améliorer encore davantage sa situation économique, ces propositions et ces conditions pourraient, je ne dis pas l’égaliser, mais seulement la rapprocher quelque peu de la situation économique de ces mêmes ouvriers dont il veut acheter le travail, alors que fait-il ? Il les refuse et il attend. Ce qui le presse n’étant pas la nécessité, mais le désir d’améliorer une |99 position qui, comparée à celle des ouvriers, est déjà très confortable, il peut attendre ; et il attendra, parce que l’expérience des affaires lui a appris que la résistance des ouvriers, qui, n’ayant ni capitaux, ni confort, ni grandes épargnes, sont