Page:Bakounine - Œuvres t3.djvu/87

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plissons. Nous croyons devoir, en vue de la liberté humaine, de la dignité humaine et de la prospérité humaine, reprendre au Ciel les biens qu’il a dérobés à la terre, pour les rendre à la terre ; tandis que, s’efforçant de commettre un dernier larcin religieusement héroïque, ils voudraient, eux, au contraire, restituer de nouveau au ciel, à ce divin voleur aujourd’hui démasqué, mis à son tour au pillage par l’impiété audacieuse et par l’analyse scientifique des libres-penseurs, tout ce que l’humanité contient de plus grand, de plus beau, de plus noble.

|184 Il leur paraît, sans doute, que, pour jouir d’une plus grande autorité parmi les hommes, les idées et les choses humaines doivent être revêtues d’une sanction divine. Comment s’annonce cette sanction ? Non par un miracle, comme dans les religions positives, mais par la grandeur ou par la sainteté même des idées et des choses ; ce qui est grand, ce qui est beau, ce qui est noble, ce qui est juste, est réputé divin. Dans ce nouveau culte religieux, tout homme qui s’inspire de ces idées, de ces choses, devient un prêtre, immédiatement consacré par Dieu même. Et la preuve ? C’est la grandeur même des idées qu’il exprime, et des choses qu’il accomplit : il n’en est pas besoin d’autre. Elles sont si saintes qu’elles ne peuvent avoir été inspirées que par Dieu.

Voilà en peu de mots toute leur philosophie : philosophie de sentiments, non de pensées réelles, une sorte de piétisme métaphysique. Cela paraît innocent, mais cela ne l’est pas du tout, et la doctrine