Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/395

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tère particuliers de chaque race et de chaque peuple, tempérament et caractère qui sont naturellement eux-mêmes les produits d’une multitude de causes ethnographiques, climatologiques et économiques, aussi bien qu’historiques, mais qui, une fois donnés, exercent, même en dehors et indépendamment des conditions économiques de chaque pays, une influence considérable sur ses destinées, et même sur le développement de ses forces économiques. Parmi ces éléments et ces traits pour ainsi dire naturels, il en est un dont l’action est tout à fait décisive dans l’histoire particulière de chaque peuple : c’est l’intensité de l’instinct de révolte, et par là même de liberté, dont il est doué ou qu’il a conservé. Cet instinct est un fait tout à fait primordial, animal ; on le retrouve à différents degrés dans chaque être vivant, et l’énergie, la puissance vitale de chacun se mesure à son intensité. Dans l’homme, à côté des besoins économiques qui le poussent, il devient l’agent le plus puissant de toutes les émancipations humaines. Et comme c’est une affaire de tempérament, non de culture intellectuelle et morale, quoiqu’il sollicite ordinairement l’une et l’autre, il arrive quelquefois que des peuples civilisés ne le possèdent qu’à un faible degré, soit qu’il se soit épuisé dans leurs développements antérieurs, soit que la nature même de leur civilisation les ait dépravés, soit enfin que, dès le début de leur histoire, ils en aient été moins doués que les autres.