Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/490

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il le sera infailliblement au dedans. Tout État, devant se laisser inspirer et diriger par une morale particulière, conforme aux conditions particulières de son existence, par une morale qui est une restriction, et par conséquent la négation, de la morale humaine et universelle, devra veiller à ce que tous ses sujets, dans leurs pensées et surtout dans leurs actes, ne s’inspirent aussi que des |52 principes de cette morale patriotique ou particulière, et qu’ils restent sourds aux enseignements de la morale purement ou universellement humaine. De là résulte la nécessité d’une censure de l’État ; une liberté trop grande de la pensée et des opinions étant, comme le pense M. Marx, avec beaucoup de raison d’ailleurs, à son point de vue éminemment politique, incompatible avec cette unanimité d’adhésion réclamée par la sûreté de l’État. Que telle soit, en réalité, la pensée de M. Marx, cela nous est suffisamment prouvé par les tentatives qu’il a faites pour introduire, sous des prétextes plausibles, en la couvrant d’un masque, la censure dans l’Internationale.

Mais quelle que soit la vigilance de cette censure, alors même que l’État prendrait exclusivement entre ses mains toute l’éducation et toute l’instruction populaires, comme l’a voulu Mazzini, et comme le veut aujourd’hui M. Marx, l’État ne pourra jamais être sûr que des pensées prohibées et dangereuses ne se glissent pas, en contrebande, dans la conscience des populations qu’il gouverne. Le fruit défendu a tant d’attrait pour les hommes, et le diable de la révolte,