Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/513

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Thiers, Gambetta, et jusqu’à M. Marx lui-même, si jamais M. Marx |67 est appelé à gouverner un État.

Cependant il se fait de nos jours un véritable progrès. Je ne sais plus qui a dit que l’hypocrisie était un hommage que le vice rendait à la vertu[1] : la diplomatie moderne tend à justifier ce proverbe. En lisant les proclamations que les hommes d’État actuels ne manquent pas de lancer lorsqu’ils entreprennent quelque chose de bien sinistre, on dirait qu’ils n’ont qu’un seul but, le bien de cette pauvre humanité. Mais, à l’époque dont je parle, ce mot était à peu près inconnu, aussi bien en Allemagne que partout. Dieu était alors le grand paravent, — le Dieu des batailles et des rois, ou, comme l’a dit plus tard le grand Frédéric, le Dieu des travailleurs. D’ailleurs à cette époque on n’avait pas même besoin de prétexte. La coquinerie des courtisans et des diplomates s’étalait dans tout son cynisme, d’autant plus honorée et fêtée qu’elle était habile et heureuse. On méprisait tant le public bourgeois et la canaille populaire qu’on ne prenait pas même la peine de les tromper. Les diplomates français, qui donnaient le ton à ceux de tous les autres pays, étaient des roués raffinés. On peut s’imaginer ce que devaient être les diplomates de l’Allemagne, égalant et souvent surpassant leurs modèles français en toutes choses, moins l’esprit.

À côté de la bureaucratie et de la diplomatie, il y

  1. C’est La Rochefoucauld, l’auteur des Maximes. — J. G.