Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 12.djvu/322

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jeunes d’Hauteserre et par ses cousins pour être rayés de la liste des émigrés et reprendre leurs droits de citoyen. Le bonhomme courut aussitôt à Paris et y alla voir le ci-devant marquis de Chargebœuf qui connaissait monsieur de Talleyrand. Ce ministre, alors en faveur, fit parvenir la pétition à Joséphine, et Joséphine la remit à son mari qu’on nommait Empereur, Majesté, Sire, avant de connaître le résultat du scrutin populaire. Monsieur de Chargebœuf, monsieur d’Hauteserre et l’abbé Goujet, qui vint aussi à Paris, obtinrent une audience de Talleyrand, et ce ministre leur promit son appui. Déjà Napoléon avait fait grâce aux principaux acteurs de la grande conspiration royaliste dirigée contre lui ; mais, quoique les quatre gentilshommes ne fussent que soupçonnés, au sortir d’une séance du Conseil d’État, l’empereur appela dans son cabinet le sénateur Malin, Fouché, Talleyrand, Cambacérès, Lebrun, et Dubois, le préfet de police.

— Messieurs, dit le futur empereur qui conservait encore son costume de Premier Consul, nous avons reçu des sieurs de Simeuse et d’Hauteserre, officiers de l’armée du prince de Condé, une demande d’être autorisés à rentrer en France.

— Ils y sont, dit Fouché.

— Comme mille autres que je rencontre dans Paris, répondit Talleyrand.

— Je crois, répondit Malin, que vous n’avez point rencontré ceux-ci, car ils sont cachés dans la forêt de Nodesme, et s’y croient chez eux.

Il se garda bien de dire au Premier Consul et à Fouché les paroles auxquelles il avait dû la vie ; mais, en s’appuyant des rapports faits par Corentin, il convainquit le Conseil de la participation des quatre gentilshommes au complot de messieurs de Rivière et de Polignac, en leur donnant Michu pour complice. Le préfet de police confirma les assertions du Sénateur.

— Mais comment ce régisseur aurait-il su que la conspiration était découverte, au moment où l’Empereur, son conseil et moi, nous étions les seuls qui eussent ce secret ? demanda le Préfet de police.

Personne ne fit attention à la remarque de Dubois.

— S’ils sont cachés dans une forêt et que vous ne les ayez pas trouvés depuis sept mois, dit l’Empereur à Fouché, ils ont bien expié leurs torts.