Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 17.djvu/650

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sieur, qui l’emportera de la fraude, de la corruption ou de la famille !… Nous avons le droit, comme héritiers, de requérir l’apposition des scellés, les scellés seront mis, et je veux veiller à ce que cet acte conservatoire soit exercé avec la dernière rigueur, et il le sera.

Mon Tieu ! mon Tieu ! qu’aiche vaid au ziel ? dit l’innocent Schmucke.

— On jase beaucoup de vous dans la maison, dit la Sauvage, il est venu pendant que vous dormiez un petit jeune homme, habillé tout en noir, un freluquet, le premier clerc de monsieur Hannequin, et il voulait vous parler à toute force ; mais comme vous dormiez et que vous étiez si fatigué de la cérémonie d’hier, je lui ai dit que vous aviez signé un pouvoir à monsieur Villemot, le premier clerc de Tabareau, et qu’il eût, si c’était pour affaires, à l’aller voir. « — Ah ! tant mieux, qu’a dit le petit jeune homme, je m’entendrai bien avec lui. Nous allons déposer le testament au tribunal, après l’avoir présenté au président. » Pour lors je l’ai prié de nous envoyer monsieur Villemot dès qu’il le pourrait. Soyez tranquille, mon cher monsieur, dit la Sauvage, vous aurez des gens pour vous défendre. Et l’on ne vous mangera pas la laine sur le dos. Vous allez avoir quelqu’un qui a bec et ongles ! monsieur Villemot va leur dire leur fait ! Moi, je me suis déjà mise en colère après cette affreuse gueuse de mame Cibot, une portière qui se mêle de juger ses locataires, et qui soutient que vous filoutez cette fortune aux héritiers, que vous avez chambré monsieur Pons, que vous l’avez mécanisé, qu’il était fou à lier. Je vous l’ai remouchée de la belle manière, la scélérate : « Vous êtes une voleuse et une canaille ! que je lui ai dit, et vous irez au tribunal pour tout ce que vous avez volé à vos messieurs… » Et elle a tu sa gueule.

— Monsieur, dit le greffier en venant chercher Schmucke, veut-il être présent à l’apposition des scellés dans la chambre mortuaire ?

Vaides ! vaides ! dit Schmucke, che bressime que che bourrai mourir dranguile ?

— On a toujours le droit de mourir, dit le greffier en riant, et c’est là notre plus forte affaire que les successions. Mais j’ai rarement vu des légataires universels suivre les testateurs dans la tombe.

Ch’irai, moi ! dit Schmucke qui se sentit après tant de coups des douleurs intolérables au cœur.